Beuvillers, commune de l'agglomération de Lisieux, se schématise ainsi : une rivière (l'Orbiquet) et une voie de chemin de fer parallèle qui coupe en son milieu le territoire communal. Sur la rive gauche du cours d'eau, après le rail, imaginez un village banal : quelques maisons établies sur la naissance de la pente et regroupées autour de l'église XIXème en brique. De l'autre coté, sur la rive droite, le paysage n'a pas la même allure champêtre : des usines et un bourg industriel, plus peuplé que le centre autour de l'église. Voilà Beuvillers et ses deux facettes : Beuvillers la campagne et Beuvillers l'industrielle.

La révolution industrielle est passée à Beuvillers au XIXème siècle. Avant, le village vivait traditionnellement d'une économie agricole. Mais, en 1844, s'installe une usine de tissage mécanique sur la commune qui utilise la force hydraulique de l'Orbiquet pour actionner les nombreux métiers à tisser. Cette entreprise est fondée par trois frères Alexandre, Alphonse et Eugène Laniel, trois patrons conscients de l'importance du progrès technique dans le développement de leurs affaires. On compte 300 ouvriers au début du siècle. Une cité ouvrière est édifiée autour l'usine pour accueillir tous ces travailleurs. Un nouveau village sort de terre, éloigné d'un kilomètre de l'église : c'est le bourg industriel sur la rive droite de l'Orbiquet. En 1953, l'usine ferme alors que la famille Laniel est à son apogée politique : Joseph Laniel est en effet président du Conseil (autrement dit Premier ministre). Cette fermeture marque la fin de l'industrie textile dans l'agglomération de Lisieux. On oublie souvent que cette région figurait parmi les premières zones textiles de France dans les années 1870.

Beuvillers n'est pourtant par devenu un village endormi. Ses usines se sont reconverties dans l'agroalimentaire (abattoirs, conserverie, cidrerie, produits laitiers). L'aspect du bourg change : de nombreux pavillons s'attaquent à la pente de la vallée. Le rouge brique des édifices de l'époque industrielle laisse place au blanc crème des maisons des nouveaux quartiers résidentiels.