Tiré du bulletin municipal officiel N°1 de
Montfort-sur-Risle
A l'époque gauloise, la Risle délimitait le territoire de deux puissantes tribus, les
Velocasses et les
Lexoves ; ceci explique que chacune des deux collines qui bordent la rivière soit une succession de camps et de fortifications.
Puis, survint la conquête romaine, sous Jules César (57 av. JC). Les Velocasses, après une longue et âpre résistance, furent vaincus et se soumirent à la domination romaine. Cette partie de la Gaule fut alors placée sous l'autorité des proconsuls. La paix revint et avec elle les arts, les sciences, le commerce et l'industrie fleurirent sur ce sol que les dissensions civiles et les invasions étrangères avaient tant de fois désolé. Des routes stratégiques furent créées, Montfort se trouvant sur la voie romaine de
Lillebonne à
Brionne.
Si le hasard d'une promenade ou les joies du plein air vous font un jour parcourir le grand val et ses environs, sachez que voici plus de mille ans, en ces lieux calmes et reposants, en cette forêt splendide, régnait une intense activité. Avoisinant le vieux Montfort, le
Rond des Forges était un centre industriel important, et avec un peu de chance, vous découvrirez peut-être quelques fragments de poterie ancienne ou quelques morceaux de vieilles tuiles. Cette même chance a permis de découvrir, en 1908, un four antique admirablement conservé, en plein bourg, dans les argiles de la côte.
Montfort doit son nom à la forteresse construite sur la colline, qui commandait la vallée de la Risle de
Brionne à
Pont-Audemer.
Avec les vestiges de cette ancienne forteresse, les puissants Comtes de Montfort firent construire, au moyen âge un château fort redoutable dont les ruines couvrent encore plus de quatres hectares et que les Montfortais appellent aujourd'hui "Le Vieux Château".
En 912 après le traité de Saint-Clair-sur-Epte, Rollon partagea avec ses compagnons d'armes les territoires qui lui avaient été accordés. Il donna Montfort à
Anslech, premier Comte de Montfort et père de
Toutain de Bastenbourg, premier possesseur de la place forte officiellement mentionné par l'histoire.
Hugues 1er son fils, lui succéda et fit construire le château.
Hugues II, brave et loyal, fut récompensé par
Guillaume le Conquérant pour son courage à la bataille d'Hastings (1066) qui lui donna 114 manoirs en terre conquise.
Hugues III, son fils, mourût en terre sainte, sans héritier direct. Son frère,
Robert 1er devint Comte de Montfort. C'est le moins intéressant des Comtes de Montfort, traître et chevalier félon il meurt après moult aventures, abandonné et méprisé par les siens. Son neveu, fils d'Alice de Montfort et de Gilbert, Comte de Gand, lui succède sous le nom de
Hugues IV. Une des plus belles figures de son époque, d'une distinction physique remarquable il apparaît comme l'archétype du chevalier d'honneur et de haute lignée. Marié à Adeline, soeur de Galeran, Sire de
Pont-Audemer, et fidèle à la mémoire du malheureux Duc Robert Courte-Heuze, emprisonné par son frère l'ursupateur Henri 1er Roi d'Angleterre, Hugues organise contre ce dernier la conspiration de la Croix Saint-Leufroy en 1123. Mais Henri, averti de ce dessein gagne
Rouen avec son armée et fait mander le Comte de Montfort. Hugues accourt, le Roi lui ordonne de rendre son château. Mais soudain, à l'entrée de la forêt de
Moulineaux Hugues s'enfuit, échappe à l'escorte royale et regagne Montfort à bride abbattue. Adeline l'attend au Pont-Levis, il engage sa dame à la résistance puis s'en va rejoindre son beau-frère Galeran. Le Roi Henri I parait bientôt à la tête d'une nombreuse armée. Il se jette sur Montfort, brûle et détruit la ville et assiège la forteresse. Le siège dure cinq semaines, enfin le château est forcé, Henri y pénètre. Surpris, il n'y trouve qu'une femme fière qui refuse d'engager son mari à la soumission. Admiratif le Roi lui laisse la liberté.
Pendant ce temps, Hugues et Galeran forment une petite armée aidés par le Comte d'Evreux. Ils livrent combat aux troupes royales dans la plaine du Bourg Theroulde ("Bourgtheroulde") ; lutte inégale où Hugues est fait prisonnier. Refusant de se soumettre, pendant treize ans le Comte fut emprisonné. Et, lorsqu'il revit le jour, sa tristesse fut grande : Galeran, le triste sir, avait trahi ! En récompense, Henri I lui avait donné le château de Montfort. Hugues IV mourut en 1152, ravagé de douleur.
Robert II, son fils et héritier, résolut de venger l'affront subi par son père. Il somme Galeran de lui rendre le château de ses aïeux. Galeran refuse. Alors Robert agit par ruse : il fait prisonnier son oncle à
Bernay et l'enferme dans la forteresse d'
Orbec jusqu'à la restitution du castel. Robert II retrouve son bien, mais Galeran, à peine libéré, accourt sous les murailles avec ses soldats. Robert et ses vaillants chevaliers font une sortie et mettent honteusement en fuite le sire de Pont-Audemer, qui n'y revint jamais.
En Normandie, Robert possédait les trois honneurs de Montfort, Coquinvilliers et Orbec. Le reste qui représentait un domaine immense, se trouvait en Angleterre. Sur la fin de sa vie, Robert II s'attira les foudres du Roi de France qui le déposséda. Son fils,
Hugues V n'eut que l'usufruit du Comté de Montfort et, à sa mort, le domaine revint au pouvoir royal. Ceci explique que les descendants de cette illustre famille se retirèrent en Angleterre où ils sont demeurés par la suite.
Le Roi Jean Sans Terre, vaincu peu à peu par Philippe Auguste, décida de détruire les principales forteresses normandes. Il s'attaqua en premier lieu aux châteaux de Montfort et de Moulineaux, et quand en 1204, Philippe Auguste arriva en vue de Montfort, il ne trouva que ruines et désolations ; c'était tout ce qu'il restait de l'orgueuilleuse forteresse des Comtes de Montfort.
