Normandie Web : Histoire |
Source : Larousse du XXe siècle en six volumes (1960)
Les Normands ou Vikings venaient des pays scandinaves, surtout de la Norvège et du Danemark. Une partie d'entre eux, les Suédois, firent des expéditions dans l'Europe orientale : sous le nom de Varègues ou Rouss. Ils occupaient, vers le milieu du IXe siècle, la vallée supérieure du Dniépr, Smolensk, Kiev, et poussèrent même, plus tard, leurs courses, ous un de leurs chefs, Igor, jusque sous les murs de Constantinople (941). Mais la grande émigration normande se dirigea vers les pays de l'Atlantique. Leur organisation en petits Etats et le surpeuplment de ces Etats les déterminèrent à chercher en grand nombre leurs subsistance dans des expéditions maritime : le pillage et la piraterie étaient chez eux des occupations honorables.
C'est par mer que les normands attaquent l'empire carolingien. Bien équipés, bien armés, très habiles à construire, comme les Romains, des camps fortifiés, obéissant à leurs chefs, les rois de la mer, ils montaient des vaisseauxDrakkar) qui pouvaient contenir chacun soixante à soixante-dix hommes (On en a retrouvé un, en 1881, à l'entrée du golfe d'Oslo) ; à leur arrivée dans un pays, ils enlevaient les chevaux des paysans et pénétraient ainsi rapidement dans l'intérieur des terres. Les expéditions normandes eurent pour premier objet le butin ; plus tard, elles visèrent à la conquêe et prirent le caractère d'émigrations : les Vikings emmenèrent alors leurs familles et eurent en plusieurs points des établissements stables, dont quelques-uns devinrent définitifs au Xe siècle.
Commencés sous Charlemagne et Louis le Pieux, les invasions des Normands ne deviennent inquiétantes qu'en 843 ; ils s'installent à l'embouchure de la Seine, occupent noirmoutiers, remontent la Garonne. Jusque vers 860, toutefois, ils ne s'établirent encore que sur les côtes et dans l'intérieur. Plus tard, le nombre des envahisseurs augmenta : la formation de deux grands royaumes en Danemark par Gorm le Vieux, en Norvège par Herald, força la noblesse scandinave à se répandre sur les mers ; d'autre part, en 878, le roi anglo-saxon Alfred le Grand mit fin, par un traité, aux invasions normandes : le flot des envahisseurs fut rejeté sur les royaumes francs. Les rois et seigneurs frnacs construisirent des ponts fortifiés, des citadelles, qui ne purent arrêter l'ennemi. Robert le Fort put quelque temps contenir les Normands de la Loire, conduits par Hastings, mais finit par succomber en 866.
La victoire du rois Louis III à Saucourt-en-Vimeu (881) n'empêcha pas les Normands de ravager la vallée de l'Oise en 884 et d'assiéger Paris 886. Du reste, les Normands trouvaient souvent des alliés parmi les grands, et les rois eux-mêms cherchaient à les employer, ou bien s'efforçaient de les éloigner à prix d'or : Charlesle Chauve acheta maintes fois leur retraite ; la grande armée normande, venue d'Angleterre en 879, et que dirigeait Siegfried, se fit payer cher de la promesse de ne plus envahir le royaume de l'Est (882) ; la belle conduite de l'évèque Gozlin et du comte Eudes dans Paris aboutit à la signature d'un traité honteux par l'empereur Charles le Gros, qui paya rançon pour paris et autorisa les Normands à piller la Bourgogne (886). Eudes lui-même, devenu roi, finit, après les avoir longtemps combattus, après les avoir vaincus à Montfaucon en Argonne (888), par traiter avec eux, et leur laissa piller l'Aquitaine et une partie de la Neustrie (897). Le traité de Saint-Clair-sur-Epte (911) marqua le triomphe complet des invasions normandes : Charles le Simple abandonna au Danois Rollon, chefs des Normands de France, tout le territoire qui constitua le duché de Normandie. Dès lors les invasions normandes s'arrêtèrent. Rollon organisa fortement son duché et rendit sédentaires ses soldats, entre lesquels il partagea ses terres. La Normandie fut le pays le mieux administré et bientôt le plus prospère de l'Occident. Le goût des expéditions lointaines, l'humeur aventureuse, ne disparuent pas complètement, il est vrai, chez les Normands ; mais ils ne s'exercèrent plus aux dépens des populations franques : la fondation du royaume des Deux-Siciles au XIe siècle, la conquête de l'Angleterre, la grande part prise aux Croisades par les Normands n'ont que vagues rapports avec les courses des Vikings à travers l'empire carolingien.